Avec son porche monumental, la grotte du Mas-d’Azil a, de tout temps attiré le regard des Hommes. Il a fallu toutefois attendre le XIXe siècle pour que le site devienne le lieu de curiosité et d’intérêt d’une discipline alors toute nouvelle, la Préhistoire. Les érudits et fouilleurs viennent alors topographier les lieux, et commencent à découvrir les premiers objets, vestiges d’occupations anciennes.

Dans un courrier de 1901, le préhistorien Édouard Piette raconte la découverte d’une pièce d’exception dans la grotte par le pâtissier du village, Jean Maury et son ami.

Maury n’avait jamais fouillé et ne fouillait nullement quand les bouquetins ont été trouvés ; il se promenait dans la grotte avec un de ses amis, quand l’un d’eux les poussa du bout de sa canne. L’autre le ramassa. Édouard Piette

L’objet en question est une dent de cachalot sculptée… oui, vous avez bien lu, une dent de cachalot !

Dans cette œuvre totalement originale, on peut voir deux bouquetins sculptés en bas-relief, de part et d’autre de la pièce. Ils sont accompagnés de motifs géométriques. Trois perforations laissent supposer que cet objet était destiné à être suspendu, le célèbre abbé Breuil y voyait une pendeloque voire une amulette.

L’étude a montré que ce n’était pas une dent fossile, elle a donc été prélevée sur un cachalot échoué sur un rivage des côtes atlantiques ou méditerranéennes. Elle était donc fraîche au moment de la sculpture.

Elle est ainsi le témoin de voyages ou d’échanges réalisés par des groupes d’hommes modernes, à travers les Pyrénées, il y a environ 16 000 ans !

Aujourd’hui conservée au Musée d’Archéologie nationale et Domaine national de Saint-Germain-en-Laye (78), cette dent de cachalot décorée fait partie des chefs-d’œuvre de la Préhistoire !

Actuellement, une seule autre dent de cachalot décorée est connue dans l’art paléolithique. Elle a été retrouvée dans le nord de Espagne, dans les Asturies, sur le site de Las Caldas, soit à près de 712 km du Mas-d’Azil ! Les deux dents proviennent-elles du même cachalot ?!

Pour la suite de l’histoire… Fort de cette découverte, Jean Maury demanda au préfet la permission de fouiller au Mas-d’Azil. Ce dernier la lui refusa et écrivit à Edouard Piette : « Laissons-le à ses brioches».